Le 8e Rallye des galeries : une belle histoire de legs à la Ville de Montréal

Publié le 25 mai 2017 par Frédéric Bourgeois-LeBlanc
Le 8e Rallye des galeries
Crédit illustration: Laurent Pinabel

C’était le 3 mai dernier que j’ai participé à mon premier Rallye des galeries, un parcours artistique vibrant à travers les galeries d’art visuel les mieux dissimulées à Montréal. Oui, oui, elles sont bien dissimulées, et c’est ça qui est intrigant pour les participants: avoir droit à un tour exclusif en compagnie des artistes et des galeristes. C’est dans cette atmosphère intime que nous nous sentions à l’aise d’échanger sur la signification des œuvres, et ce, sans retenue ni timidité. Chacun possède son propre regard subjectif sur le sens même d’une œuvre ou d’un agencement de couleurs, alors comment s’empêcher de s’exprimer quand l’artiste est à deux pas de nous, l’oreille grande ouverte à notre interprétation. Je ne sais pas pour les autres participants, mais l’ambiance festive et commémorative du 375e anniversaire tout autour de nous a imposé son filtre sur le rallye, comme si chaque œuvre était un bel hommage à Montréal à titre de métropole culturelle.

Serge Tousignant, à Vox
Crédit photo: Charles Bélisle

Notre premier rendez-vous avec l’art de Montréal a eu lieu à Vox, le centre de l’image contemporaine, qui regroupe aussi la bibliothèque d’art contemporain Artexte, sur la rue Sainte-Catherine, à deux pas de la Place des arts. C’est avec de grands bras invitants que l’artiste Serge Tousignant nous a souhaité la bienvenue dans sa grande exposition. Avec quelques verres de vin encaissés et les yeux grands ouverts, j’ai découvert une immense salle d’exposition garnie en œuvres photographiques, en dessins et en sculptures, misant sur une approche rétrospective de sa carrière. Les labyrinthes blancs de la galerie Vox nous permettaient d’arpenter les différentes phases de la carrière de l’artiste, à partir de 1966 jusqu’à aujourd’hui. Le tout incluait un regard photographique sur ses voyages exotiques, les expositions auxquelles il a participé à Montréal ainsi que les différents mouvements culturels à travers les années. Avec un sens impressionnant du décor et de la forme géométrique, Serge nous a accompagnés tout au long du parcours, en partageant souvenirs et introspections sur sa carrière. Autant ce fut un regard profond sur l’homme, autant ce fut une visite hautement colorée des courants artistiques de sa ville depuis les dernières décennies. Ayant toujours beaucoup admiré l’art photographique, je ne pus que constater à quel point le jeu de l’éclairage et des couleurs se mariait bien avec « la page blanche » qu’était la salle d’exposition. Bref, une belle première lettre d’amour aux lieux culte des expositions à Montréal. Maintenant tous ressourcés, le rallye pouvait commencer!

Crédit photo: Charles Bélisle

Arrêt #1 – l’atelier de Michel de Broin

Michel de Broin dans son atelier
Crédit photo: Charles Bélisle

À bord d’autobus jaunes, tels des écoliers, le cerveau comme une éponge, en route vers leur visite au musée, notre premier stop fut une halte artistique plutôt « architecturale ». L’artiste Michel de Broin, maître d’assemblage, d’architecture et de photographie, nous a ouvert les portes de son atelier, quartier Rosemont, nous dévoilant un monde rempli d’idées-concepts adaptées à Montréal et ses espaces urbains. Grandement inspiré par la cité « physique » qu’est la métropole, Michel nous a présenté ses maquettes montées de manière minimaliste, nous dévoilant en grande primeur les premières étincelles de son legs pour Montréal. Débutant par un escalier organique qui servirait à remplacer l’autoroute Bonaventure, en passant par une étoile géante formée de béton, et en concluant avec une chaîne de montage de châteaux de sable, l’artiste a su nous convaincre que l’art est un acte d’amour envers les grands espaces. Avec une méthode mécanique et conceptuelle, les œuvres et les croquis de Michel se veulent une belle hypothèse imagée d’une ville où il fait bon vivre et où les legs culturels se veulent invitants pour les touristes en visite à Montréal. En d’autres mots, selon l’impression qui m’est restée en tête en voyant dans son studio cet artiste souriant et tout en gestes, est que nous rêvons tous d’une métropole dont les infrastructures lui donneraient une allure invitante et moderne. Par l’entremise d’un art « construit » et physique, Michel de Broin a réussi à nous faire le portrait d’une ville engagée où les citoyens projettent leur ouverture sur le monde dans les structures environnantes. Montréal est déjà une ville débordante de changements, autant au niveau de ses infrastructures que de ses routes et ses établissements, mais le grain de sel apporté par Michel nous fait rêver d’une abondance de vivacité et d’ouverture sur le monde. Ce ne sont certainement pas tous les artistes qui peuvent aussi aisément accepter de nous donner un pareil accès à leur studio. Merci à Michel Broin et son équipe d’avoir partagé avec nous leur vision de Montréal, la ville de culture qu’elle se doit d’être!

Dans l'atelier de Michel de Broin
Crédit photo: Charles Bélisle

Arrêt #2 – Pierre-François Ouellette art contemporain

Maintenant transportés vers la rue Rachel, c’était au tour du collectionneur et grand passionné d’art Pierre-François Ouellette de nous ouvrir les portes de son palais orné d’art visuel. Mélangeant les types d’arts, les artistes ainsi que les agencements dans l’espace, cette galerie donne l’impression d’une mosaïque, tellement les œuvres et leurs divers courants inondent notre environnement. De Marie-Jeanne Musiol, à Kent Monkman, en passant par Jérôme Fortin, en exposition permanente, la collection est tellement immense qu’il est difficile de décrire tous les artistes exposés en une seule phrase. Cependant, l’un d’entre eux sortait du lot dès l’entrée : Dil Hildebrand, le maître du collage. Ses œuvres démontrent un caractère « physique » par l’art de la surimposition (des collages de matériaux les uns par-dessus les autres). C’est une approche dite en trois dimensions, donc qui donne un peu plus de profondeur à l’œuvre. Selon le site Internet de la galerie, ce jeu moderne des formes et des éléments dimensionnels se veut une métaphore pour représenter les écrans de télévision*. L’homme constamment connecté aux écrans (appareils mobiles, ordinateurs, jeux vidéo, télévision par câble, etc.) serait donc exposé à une autre réalité où les matières picturales sont collées sur des matériaux vitreux. Très intéressant, considérant nos habitudes d’aujourd’hui.

*Source : PFOAC

Pierre-François Ouellette art contemporain
Crédit photo: Charles Bélisle

En continuant d’admirer tous les recoins de la galerie, le bureau majestueux de Pierre-François nous a été ouvert, pour y découvrir un agencement parfait entre les toiles accrochées au mur et les sculptures déposées sur son bureau (notamment le Magnum Raven par Maskull Laserre; un revolver en bronze ayant été refondu). La vue sur une petite cour intérieure étant bien sûr une valeur ajoutée. Oh… j’allais presque oublier le deuxième étage, qui fut une autre agréable surprise. Dans un salon rappelant la série Mad Men, muni de divans en cuir, de tables vernies ainsi qu’une multitude de tableaux, l’ambiance nous donnait presque l’impression que l’espace se voulait un lieu de réflexion sur l’art et la culture à Montréal. Comme les autres galeries avant celle-ci, celle de Pierre-François idéalisait la culture montréalaise à sa manière, notamment par le bel hommage à Dil Hildebrand, mais aussi pour cette diversité des genres et des styles artistiques (un beau clin d’œil au multiculturalisme de notre société).

Crédit photo: Charles Bélisle

Arrêt #3 – B312

De retour en plein centre-ville, sur Sainte-Catherine, tout près de notre point de départ, la galerie B312 nous attendait dans un bâtiment abritant plusieurs bureaux et studios artistiques, où de longs corridors « Kubrickiens » (à l’image des longs corridors horrifiques idéalisés dans les films de Stanley Kubrick) parsemaient ses étages. Étant un organisme à but non lucratif, cette galerie soutient les jeunes artistes indépendants voulant exposer leurs œuvres. Ce qui est encore plus intéressant, c’est que les artistes sont également employés et responsables de la programmation de B312. Donnant un accès exclusif à l’art de l’image et ses artistes, la galerie et ses représentants remplissent également leur mission pour la Ville de Montréal en aidant ces artistes émergents.

Galerie B312
Crédit photo: Charles Bélisle

Les matériaux, les styles et les méthodes pour la réalisation des œuvres sont nombreux et certains même peu conventionnels (du bois d’érable, des croquis au crayon ou encore du scrapbooking composé de différents objets), elles sont d’ailleurs en vente aux visiteurs. Célébrant cette année leurs 25 ans d’implication auprès des artistes de Montréal, c’est le moment de contribuer au mouvement en achetant les œuvres qui vous inspirent.

Galerie B312
Crédit photo: Charles Bélisle

Arrêt final – Les ateliers Jean-Brillant

Pour la grande finale, nous nous retrouvions tous aux ateliers Jean-Brillant, non loin du Marché Atwater où un groupe de musique nous attendait, jouant à fond la caisse. Le réseautage pouvait donc continuer, en compagnie des autres membres de la Brigade, en plus d’une visite surprise d’experts de l’art du conte pour nous raconter quelques anecdotes cocasses. L’objectif de cet établissement est justement d’offrir aux artistes et créateurs un espace unique favorisant les rencontres, l’inspiration et le montage de projets plus inspirants que jamais. Bref, une belle conclusion à un rallye à l’honneur de notre ville!

Un texte de Frédéric Bourgeois-LeBlanc, relationniste pour la firme de relations publiques Citoyen Optimum à Montréal et collaborateur de BAAM. 

Extrait d'une pièce de théâtre aux ateliers Jean-Brillant
Crédit photo: Charles Bélisle
Frédéric Bourgeois-LeBlanc Billet par : Frédéric Bourgeois-LeBlanc