Les Marcheurs de Montréal de Marzia Pellissier
À travers une série d’entrevues, découvrez les projets artistiques des cinq lauréats de la 8ème édition des Mécènes investis pour les arts. Aujourd’hui, nous vous présentons Marzia Pellissier et sa série de balados Les Marcheurs de Montréal.
BAAM: Pouvez-vous nous décrire votre parcours ?
Marzia Pellissier: “J’ai toujours eu une sensibilité pour l’imaginaire, les histoires, les couleurs, les humains et l’intensité! Très jeune, j’ai été attirée par la scène, j’ai commencé à faire du théâtre et de l’improvisation, j’aimais beaucoup écrire aussi. Assez rapidement, ma vraie nature m’a rattrapée : je suivais une formation de théâtre de mouvement et c’est là que je me suis rendue compte que je m’intéressais beaucoup plus aux costumes et à l’environnement qu’au rôle que je devais jouer! Je pouvais passer des nuits à peaufiner mon costume… C’est à ce moment que j’ai décidé de devenir scénographe en unissant ma passion pour le théâtre et en suivant les traces de mon père architecte et restaurateur d’œuvres d’art avec qui j’ai eu l’occasion de travailler à plusieurs reprises. J’ai vraiment trouvé ma place dans l’union de l’artistique à la technique.”
BAAM: Pouvez-vous nous décrire votre projet artistique, Les Marcheurs de Montréal ?
Marzia Pellissier: “Les Marcheurs de Montréal est une série de balados déambulatoires qui arpentent les arrondissements de Montréal. Ils proposent de prendre le temps d’observer la ville tant au niveau urbanistique et ethnographique qu’imaginaire. Le projet se veut pérenne dans le temps, tel un jalon de mémoire dans l’espace et l’esprit.
Chaque récit est bâti à partir de témoignages citoyens, de faits historiques et de projections imaginaires. Le participant se procure le sac associé au trajet dans un point de prêt et se connecte au balado. Une trame sonore à deux personnages dirige le parcours : la voix de Montréal donne les indications d’action et informe sur son histoire. L’autre personnage accompagne, tel un nouvel ami que l’on rencontre par hasard. Il est en réalité le cumul des récits des habitants du quartier. Une trame musicale accompagne la déambulation, se mêlant aux sons ambiants, créant une atmosphère propre à l’âme du quartier. Un sac personnalisé accompagne chaque trajet, dévoilant des objets qui ponctuent le récit et incitent le participant à entrer en relation avec des lieux du quartier.”
BAAM: Est-ce votre premier projet ? Quels sont les autres projets que vous avez réalisés par le passé ? Avez-vous d’autres projets en cours ?
Marzia Pellissier: “C’est le premier balado que je réalise, mais j’ai toujours été sensible aux projets sonores par l’écoute sensible et le rapport de proximité qu’ils suscitent. En tant que scénographe, on a pu voir mes créations sur les scènes des différents théâtres, entre autres dans certains spectacles de Queen Ka et du Nouveau Théâtre Expérimental. Au cinéma, j’ai travaillé au sein des départements artistiques de nombreux films (The Walk, X-Men Days of Future Past, Ma vie avec John F.Donovan) et plusieurs autres films et téléséries. Je suis toujours curieuse de nouvelles avenues du design, depuis quelques années j’approfondis ma recherche en design d’exposition et urbain. En 2017 et 2019, j’ai découvert un intérêt profond pour la recherche documentaire et j’assume la direction artistique des expositions Queen Ka - De la Poésie au Slam présentée à la Place des Arts et Itai dōshin [un même cœur dans des corps différents], en collaboration avec Marie-Hélène Bellavance et Corpuscule Danse.”
BAAM: De qui vous êtes-vous entourés pour réaliser votre projet (collaborateurs, partenaires, soutiens) ? Où allez-vous développer votre projet (salle, territoire, Web) ?
Marzia Pellissier: “L’idée originale et l’identité du projet ont été développées par Élodie Pinero et moi-même. On s’est rencontrées en 2017 au DESS en design d'événements de l’UQAM. Mandatées de relever des contrastes de la ville de Montréal, on a toutes les deux manifesté des questionnements sur la frénésie urbaine et la surconsommation événementielle. Sans le savoir, on donne naissance au projet Les Marcheurs de Montréal, une brèche imaginaire dans les chemins quotidiens, un espace de réserve, de réflexion et de rêverie.
En 2020, suite aux réflexions de départ et au vide culturel dû à la pandémie, je décide de me lancer dans la production et la réalisation du projet pilote La Marche du Nostalgique. Martin Bellemare (La Liberté, Cœur Minéral) se joint à moi pour l’écriture du récit. Jocelyn Pelichet, musicien, compositeur et concepteur sonore, se joint à l’équipe pour créer le leitmotiv musical propre au projet et la trame musicale qui s’entrelace aux sons ambiants enregistrés et réels. L’ambiance sonore soutient la narration ponctuellement. Les comédiens et le mixage sonore final viennent unir le tout dans une œuvre de fiction ancrée dans le réel. Peyre Pellissier crée le site web qui met à disposition une approche unique où le participant s’oriente et écoute les pistes de la trame sonore à l’aide de la carte interactive.
La Marche du Nostalgique a vu le jour grâce au soutien et à la diffusion de la Maison de la culture de Rosemont–La Petite-Patrie et la bibliothèque de La Petite-Patrie. Solon a aussi appuyé le projet. Plusieurs partenaires ont contribué à la réussite du projet comme Les Tatoués, Atelier 7Hz, Tatouage Electric Avenue et le Studio Mandragore.”
BAAM: Quelle sera l’expérience pour votre public ?
Marzia Pellissier: “Fort de son projet pilote La Marche du Nostalgique dans Rosemont—La Petite-Patrie, l’équipe aimerait que la diffusion de l'événement continue de se faire dans le réseau des Maison de la Culture de Montréal, dans les bibliothèques municipales pour permettre à tous d’y accéder facilement et gratuitement. Plusieurs exemplaires de chaque sac seront mis à disposition. Les parcours des Marcheurs de Montréal sont proposés sur le site web où une carte interactive permet l’écoute du balado à l’aide d’un téléphone intelligent. Pour rendre le projet accessible à tous, des lecteurs Mp3 sont mis à disposition au comptoir de prêt où le sac qui accompagne la Marche peut être emprunté. Les Marcheurs de Montréal aimerait développer deux nouveaux parcours d’ici l’automne 2021. Pour les prochains parcours, Marzia Pellissier désire approfondir les relations avec les instances culturelles des quartiers et les organismes communautaires.”
Crédit photo : Maxime Labrecque
BAAM: Qu’est-ce qui vous inspire et/ou influence votre travail dans le paysage culturel et artistique montréalais ?
Marzia Pellissier: “La vie, les êtres humains et les surprises du quotidien sont pour moi la plus grande source d’inspiration. J’aime aussi toutes les formes d’art, la musique, la poésie, le théâtre… Dans les projets sonores, j’aime beaucoup la mission d’Audiotopie et de Magnéto. Sinon, dans l’approche au public, j’aime la façon dont Le Comité pense ses événements et l’effort de réflexion que l’équipe développe dans sa philosophie (voir ses manifestes). Enfin, j’aime l’artiste visuelle Marie-Hélène Bellavance pour l’humanité qu’elle met dans ses projets.”
BAAM: Quel sera l’impact de la bourse MIA sur votre projet et que pensez-vous de la philanthropie en art ? Aimeriez-vous être soutenu plus directement par des mécènes dans votre projet ?
Marzia Pellissier: “Je suis très touchée par la reconnaissance des Mécènes. Je ne sais pas exactement l’impact qu’elle aura sur mon projet, mais assurément un rayonnement et une visibilité. La Bourse me donne un petit fond de départ pour la reprise de La Marche du Nostalgique et pour la pré-production des nouveaux parcours. Dans mon projet, j’aime faire des échanges de services directs avec les commanditaires plutôt que des échanges financiers. Je place sur mes parcours des commerces locaux qui teintent le paysage et je ne voudrais pas que ces choix soient faits par une force financière. Pour ce qui est de la philanthropie en art, je n’y connais pas grand-chose, j’en suis à mon premier projet en tant que productrice, mais je trouve que les sources de financement sont limitées. Je crois que des partenariats plus directs avec les mécènes pourraient permettre une plus grande autonomie financière aux artistes et créer aussi des œuvres plus accessibles.”
> Pour en savoir plus ou devenir un Marcheur de Montréal :
→ https://lesmarcheursde.com/
> Vous êtes intéressé(e) à joindre le groupe des Mécènes investis pour les arts ? Nous vous invitons à contacter Florence Troncy ou Sarah-Hébert Tremblay, membres du CA de BAAM et du groupe des MIA, à info@baam-org.com.